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Au coeur du metavers | Fabien Brochard (Creative Director / Founder)

Dans le cadre de notre dossier « Au coeur du metavers », Fabien Brochard (ou Mao Mornity)   de Magic Machine a accepté de faire un point sur ses expériences et sur les grands enjeux du secteur de la réalité virtuelle.

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je m’appelle Fabien Brochard, mon nom d’artiste est Mao Mornity, j’ai 40 ans et travaille dans les arts visuels digitaux depuis 6 ans maintenant. Auparavant j’ai officié en tant qu’ingénieur du son dans l’audiovisuel pendant 15 ans. J’officie aujourd’hui principalement en direction artistique et direction créative, majoritairement pour des projets XR, mais aussi plus classiquement dans le jeux vidéo, le cinéma ou la publicité. Artiste freelance, j’ai également monté un studio d’outsourcing, Magic Machine, qui me permet de prendre en charge des projets plus conséquents, avec une petite équipe montée sur mesure. Avant de me lancer en direction artistique, je me suis spécialisé en concept art, ainsi que dans la création d’environnements 3D et l’animation 3D.
 

Pouvez-vous décrire brièvement ce qu’est le Métavers  et comment il diffère des autres concepts similaires tels que la réalité virtuelle (VR) ou la réalité augmentée (AR) ?

Question complexe pour une réponse courte. Je dirai qu’un Métavers, car il n’en existe pas qu’un, nous ne sommes pas dans le film Ready Player One, est un espace de partage digital, où des personnes vont pouvoir échanger et partager des expériences avec des règles qui ne sont pas forcément celles du réel. Cet espace peut être créé par des marques ou des sociétés, mais aussi parfaitement indépendantes. Un Métavers n’est pas forcément en réalité virtuelle ou augmentée, c’est un biais de communication, qui a été fortement mis en avant. Et si on occulte le terme marketing, un logiciel de chat est finalement déjà un Métavers. La question serait donc plutôt, qu’est ce qui défini l’appellation Métavers, et quel en serait sa véritable valeur ajoutée.
 

Quels sont les cas d’utilisation les plus courants du Métavers dans différents domaines tels que le divertissement, l’éducation, le commerce électronique, etc. ?

Il en existe de nombreux, et tous n’ont pas forcément passé le cap de l’adoption par le public. Clairement le divertissement est la face émergée de l’iceberg. On peut citer le plus ancien et connu, qui a été Second Life il y a déjà quelques années. Et aujourd’hui dans cette même veine, nous pouvons trouver VR Chat, Horizon, Rec Room, Altspace, Roblox, même Fortnite et bien d’autres, qui sont avant tout des sortes de super chat en réalité virtuelle ou XR, avec une grosse dominance de gamification. Altspace étant peut être un peu à part, avec une volonté de partager sur des sujets de société, les conférences TedX y sont par exemple retransmises, et il est possible d’y assister avec son avatar, et d’échanger avec un autre utilisateur venant du bout du monde qui se trouverai à côté de soi dans l’espace virtuel.
Dans l’éducation il existe des solutions mises en place par de grandes universités par exemple, mais elles sont peu mises en avant. Nous avons par exemple de la collaboration active dans le médical, ou des spécialistes peuvent se rejoindre et « pratiquer » pour échanger des solutions.
Le commerce électronique est assez absent en réalité de ce type de média, et j’en suis assez étonné. J’ai l’impression qu’aucun n’a réellement saisi le potentiel, et que beaucoup se sont freinés par l’adoption assez lente encore des périphériques VR ou AR, alors que comme dit précédemment, un Métavers n’est pas forcément lié à cela. Bien sûr il existe des pistes comme shopify ou decentraland, mais cela manque de fun et d’intérêt pour l’utilisateur, plus le fait que souvent ces portails sont adossés à des cryptomonnaies, cela refroidi clairement une bonne partie des utilisateurs, et empêche clairement le grand public de comprendre le principe.
 

Comment le Métavers peut-il remodeler les interactions sociales et la collaboration en ligne ?

Qu’une chose soit claire, le réel contient déjà l’essentiel possible des interactions et collaborations entre les personnes. En cela remodeler n’est sans doute pas l’axe a suivre. Augmenter oui. Comme les réseaux sociaux avec l’avènement du Web 2.0, cela peut permettre d’échanger et de rencontrer des personnes du monde entier plus facilement, et pourquoi pas de rencontrer et échanger de manière plus efficace avec ses contacts et amis. Vous savez, ces 4000 followers dont on en connait en réalité qu’une poignée. Ensuite c’est une question d’objectif. Comme il n’existe pas « un » mais autant de métaverse qu’il pourrait y avoir d’idées ou d’entreprises intéressées, que propose t’on? Il me semble donc primordial que l’on doit proposer aux utilisateurs des possibilités qu’il ne possède pas dans le réel. Possession, création, pouvoirs, contrôle… Mais surtout une accessibilité. C’est ce qu’il manque actuellement à tout ceux ou presque qui s’y sont essayé. Et la bascule s’opèrera lorsqu’une ou un nombre réduit de plateformes saura agréger des grosses communautés d’utilisateurs. Encore une fois, coucou Ready Player One, ou autres films/livres du genre. Une fois le nombre critique d’utilisateurs atteint, on pourra effectivement parler de re-modélisation des interactions et de la collaboration.
 

Quels sont les défis actuels auxquels est confronté le développement du Métavers, que ce soit sur le plan technologique, réglementaire ou éthique ?

Clairement aujourd’hui le principale problème est technologique. Au moment du covid, avec tout le monde coincé à la maison, et un mini boom des achats de périphériques de réalité virtuelle, il y a eu une sorte d’appel d’air et d’espoir à ce niveau. Mais une fois le retour à la normale, les gens préfèrent quand même sortir, on ne va pas se mentir. Il me parait donc extrêmement important de développer des solutions hybrides pour qu’un maximum d’utilisateurs puisse participer. Ensuite seulement, certain usages attirerons plus que d’autres, et tirerons ce type de média dans une direction ou une autre. Il me parait cavalier d’adosser un Métavers à une technologie, si cette dernière n’est pas bien implantée. Côté règlementaire ou éthique, on peut déjà se base sur ce qui existe déjà en ligne, mais évidemment il faudra encore plus se pencher sur l’utilisation des datas, et ce que l’on peut accepter ou contrôler des interactions avec les autres. Je vais prendre un exemple simple. La majeure partie des Métavers actuels en VR, proposent des bulles d’espace de sécurité autour de l’avatar de l’utilisateur. Et ce afin d’éviter que d’autres utilisateurs pas forcément responsables, se collent trop près de vous et vous oppressent. Au final c’est assez logique, mais ça n’avait pas été anticipé.
 

Comment les entreprises peuvent-elles exploiter le metaverse pour offrir des expériences uniques et créer de la valeur pour leurs clients ? Quelles sont les stratégies à adopter pour tirer parti du potentiel commercial du metaverse ?

On arrive ici à l’axe principal du pourquoi ça n’existe pas encore de manière efficace. Comme il n’existe pas un seul, mais plusieurs Métavers, en tant qu’utilisateur, ou client, j’ai peu d’attirance sur le fait de devoir en gérer plusieurs. Donc le premier axe est qu’il faudra une plateforme, ou quelques unes, globales, pour agréger les contenus, et donc les marques. Meta s’y essaie avec assez peu de succès, en poussant ses casques et avec l’application Horizon. Mais il faut un peu penser plus large et imaginer l’ store ou ce genre d’applications. Oui, une marque pour se positionner dans un Métavers devra sans doute devoir verser de l’argent à une plateforme. Ainsi elle n’aura à s’occuper « que » de sa présence et communication, mais pas de l’infrastructure. Ensuite proposer des entrées variées. Oui un casque de réalité virtuelle, ou des lunettes de réalité augmentées, mais aussi, la réalité augmentée sur tablette ou téléphone, et également un accès en « flat » c’est à dire sur une application classique, comme un jeu vidéo. Il faut que tout le monde puisse y accéder, quelque soit son type de terminal. Ensuite seulement des usages en ressortirons. Si la valeur ajoutée d’avoir un casque VR est très importante, l’adoption par les utilisateurs suivra. Enfin, proposer des expériences intéressantes. Pour le moment c’est peu le cas. J’ai eu l’occasion de travailler sur plusieurs expériences en VR qui n’étaient pas des Métavers, quoique, qui m’ont fait comprendre le potentiel pour des marques à travers des choses simples. Pendant le covid, la Mostra de Venise à réalisé une expérience en VR pour visionner les films VR présentés. Ca s’y prêtait bien. La société VRRoom avait recréé un bout de Venise, des salles de cinéma, et une salle de réception avec plein d’activités virtuelles, un DJ, etc. Sur les tables, il y avait des cannettes de boisson Monster, un bête objet 3D, puisqu’ils étaient un des sponsors. Et bien les participants à cette expérience, ont pour beaucoup acheté des canettes de Monster par la suite, car le simple fait d’avoir été mis en « contact » virtuel avec le produit, leur a fait pensé plus fortement à son adoption. C’est à mon sens l’axe majeur pour des marques, il faut repenser l’expérience utilisateur, pour le fidéliser d’une manière qu’il ne pourrait pas réaliser dans le réel. Un modèle 3D coûte bien moins cher à fabriquer qu’un véritable produit. Il faut donc réussir à convertir une expérience dans le Métavers, en achat dans le réel, ou en achat premium avec des fonctionnalités en plus dans le Métavers. Et vice versa.
 

On a parfois l’impression que le métavers n’a pas su convaincre le grand public. Y a t-il tout de même un avenir pour cette technologie ? Lequel ?

La réponse est un grand oui. Le souci vient du fait que comme souvent, on a créer ou utilisé cette technologie, avant le besoin, ou l’utilisation. Et c’est souvent le cas. L’autre exemple récent sont les NFTs. La technologie est extrêmement intéressante, mais la première utilisation montrée n’est pas la bonne, et a participé à son effondrement rapide. Quand l’électricité est arrivée, tout le monde n’y avait pas d’intérêt, et les usages n’existaient pas forcément tous. C’est venu au fil du temps avec la compréhension de la technologie. Pour moi, ici c’est pareil. Il y a eu un effet d’aubaine au moment du covid, beaucoup s’y sont engouffrés sans réelle stratégie de long terme, et ça a fait « pshit ». Comme dit précédemment, il faudra que beaucoup de ces petits Métavers se rejoignent sous une grande bannière accessible et avec des usages anticipés, pour que la mayonnaise prenne. Et il y a déjà des pistes très intéressantes, et plein de gens qui y réfléchissent. Malgré tout cela demandera un gros investissement matériel et financier, qui ne sera pas à la portée de la première société. Je reste très en attente de ce deuxième monde rêvé par la science fiction, on ne se refait pas, qui a mon sens à beaucoup de potentiel. Pour les expériences utilisateur bien sûr, mais aussi pour des marques, de trouver un relais de croissance nouveau, en période d’inflation justement, et de baisse de consommation dans le réel. Il y a une vraie carte à jouer ici.
 

Quels sont les projets et les initiatives majeurs en cours dans le domaine du métavers ? Pouvez-vous donner des exemples de plateformes ou de projets qui se démarquent dans ce domaine ?

Du côté du jeu vidéo, ceux qui fonctionnent bien sont évidemment Fortnite et Roblox, même si ce dernier surfe sur plusieurs aspects. Cela montre qu’il y a un public, que ça attire, et que ça rapporte pour ces sociétés qui investissent dedans. Decentraland et The Sandbox sont très intéressant aussi, mais trop adossés à des cryptomonnaies. Je pense que le grand public pour s’y intéressé doit pouvoir payer avec ses euros, comme dans n’importe quelle application, sans devoir se créer un wallet et mettre les mains dans une technologie qu’il ne comprend pas encore. Je suis très fan de VR Chat depuis longtemps, c’est à mon sens une des meilleurs expérience. Accessible gratuitement, en « flat » ou en réalité virtuelle, bourrée de contenu, permettant interactions, jeu et plus encore. Des concerts ont eu lieu sur cette plateforme, comme Jean Michel Jarre plusieurs fois. Des évènement internationaux, Mostra de Venise, South by Southwest… Le degré de personnalisation pour l’utilisateur est assez grand, mais créer des espaces ou les modifier demande des compétences techniques qui ne sont pas à la portée de tous. En gros on est acteur, mais pas forcément créateur. C’est l’anti Meta Horizon, qui est tellement froid et impersonnel, qu’il apporte peu d’intérêt, malheureusement, mais où il est plus facile de créer des petites choses. Il faut un curseur médian, où l’utilisateur peur s’approprier l’outil, créer dans une certaine mesure, partager, découvrir des choses. Puis un contenu payant ou adossé à des marques, qui permettent d’aller plus loin.
 

Quels conseils donneriez-vous aux entreprises ou aux individus qui souhaitent s’impliquer dans le métavers ou tirer parti de ses possibilités ?

Penser global. Si on a toujours pas de grand Métavers, c’est parce que personne n’est d’accord, ou alors tout le monde veut tirer son épingle du jeu sans partager. Hors si le Métavers et l’image digitale du monde réel, nous n’en avons qu’un, et c’est pour cela qu’il permet tant d’interactions. Il faudra donc s’associer beaucoup plus. On ne peut pas vouloir changer et augmenter les possibilités des utilisateurs, si les créateurs eux même ne le font pas. Meta à sa manière à montré maladroitement la voie, il y a de la place à d’autres agrégateurs ayant les moyens de créer des plateformes de grande taille. Mais eux aussi doivent s’appuyer sur les personnes et les marques souhaitant faire grandir ces écosystèmes. Et envisager cela de manière plus collégiale et conviviale. Ensuite, penser les usages, il faut s’adapter, prendre exemple sur le réel, et l’augmenter. Oui dans un Métavers on va avant tout vouloir jouer aux sims, personnaliser son avatar, son espace personnel, les expériences que l’on souhaite partager. Donc il faut du contenu, des possibilités d’amélioration, fun et compétitives. Faire un cinéma avec des amis du monde entier dans une salle privatisée et voir le dernier film à l’écran, inspirons nous de Big Screen, et ayons des salles de cinéma virtuelles. Je veux me déplacer dans le monde avec mes amis, pourquoi pas louer une voiture virtuelle, et se retrouver dans le modèle 3D, réplique de celle qu’on ne pourra jamais se payer en vrai, pour quelques euros à la location. J’achète une paire de chaussure à la virgule dans mon magasin habituel, j’en reçois une copie virtuelle pour mon avatar dans le Métavers, pourquoi pas en NFT. Et l’inverse aussi, j’achète un cosmétique dans le Métavers, et je reçois un bon de réduction pour l’acheter dans le réel. Bref, tellement de possibilités et d’usages à définir.

Le coup de cœur de Julie❤️

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Julie – Journaliste realite-virtuelle.com

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