Dans le cadre de notre dossier spécial « Au cœur du métavers », nous avons eu l’honneur d’interviewer Jordane PAQUET, expert du 3dverse, qui nous livre son analyse éclairée sur les défis actuels et les perspectives d’avenir dans le secteur en pleine évolution de la réalité virtuelle.
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Jordane Pâquet, Président de la société T-Lipps. Avec désormais 16 ans d’expérience sur le marché du serious gaming, j’ai eu la chance de concevoir et mettre en place un peu plus de 180 projets clients sur ce marché. J’enseigne ma vision depuis 10 ans à l’université de Lorraine et à l’Université de Lille en tant que Maître de conférences.
Pouvez-vous décrire brièvement ce qu’est le Métavers et comment il diffère des autres concepts similaires tels que la réalité virtuelle (VR) ou la réalité augmentée (AR) ?
Le Métavers est un univers virtuel parallèle à la réalité (le plus souvent en 3D temps réel s’il est immersif, sinon il peut aussi être exclusivement composé de datas interconnectées). La VR est un outil permettant d’accéder et de se mouvoir dans un métavers (ou autre tel que de la vidéo 360) le plus souvent via un casque de VR. L’AR est un outil de projection permettant de visualiser un objet ou une scène virtuelle dans le réel au travers d’une interface de projection (mobile, tablette, affichage tête haute, hologramme, ….).
Quels sont les cas d’utilisation les plus courants du Métavers dans différents domaines tels que le divertissement, l’éducation, le commerce électronique, etc. ?
Dans le divertissement c’est le plus souvent un monde immersif ouvert, dans l’éducation on se rapproche d’un Second Life modernisé (et surtout modéré), l’idée est de se projeter dans un univers dans lequel faire des choses d’ordre divertissante, pédagogique ou commerciale. A l’image de ce qu’on pourrait faire dans le réel, mais on le fait de manière virtuelle.
Comment le Métavers peut-il remodeler les interactions sociales et la collaboration en ligne ?
Quelles sont les opportunités offertes par le métavers pour la communication et l’interaction humaine ?
La virtualisation est la grande différence vis à vis d’un réseau social. Dans les 2 cas on contrôle son image et on choisit un univers qui nous plait. Un réseau social se lit et se visualise, un métavers se vie ! L’immersion permet de décupler le sentiment d’engagement et développe l’intérêt à l’action. L’objectif est ainsi d’obtenir un plus fort taux de participation … guidé par les émotions décuplées par l’immersion.
Quels sont les défis actuels auxquels est confronté le développement du Métavers, que ce soit sur le plan technologique, réglementaire ou éthique ?
Sur le plan technologique, comme dans toute période de « bulle technologique », on voit apparaître une multitude d’offres technologiquement non reliées les unes aux autres dans un premier temps. Le marché est grand mais une place dominante est à prendre pour proposer et offrir les services attendus par les utilisateurs. Quels sont-ils ? Là est la grande question, c’est le principe de l’offre et de la demande, l’un commence et l’autre s’affine avec le temps. Sur le plan règlementaire et éthique de nouvelles limites sont à établir et ce sur le plan International car Internet n’a que très peu de limites. Pour que ça fonctionne il faudra des limites claires sinon les utilisateurs n’y adhèreront pas ou seulement une niche. Ce fut notamment le problème de Second Life qui n’a persisté qu’à travers des dérives de prostitution virtuelle (pas que, mais un peu tout de même).
Comment les entreprises peuvent-elles exploiter le metaverse pour offrir des expériences uniques et créer de la valeur pour leurs clients ? Quelles sont les stratégies à adopter pour tirer parti du potentiel commercial du metaverse ?
L’imaginaire prend ici sa plus grande place ! les entreprises qui veulent vendre leurs produits ou leur service y vois un portail commercial à la recherche d’un placement produit, les concepteurs y voient la possibilité de développer de nouveaux usages permettant de faciliter la vie des utilisateurs sur divers aspects, puis d’autres s’intéresseront à la data et indirectement aux utilisateurs eux même pour leurs venir en aide ou mieux les comprendre pour revendre leurs données. Le métavers est révolutionnaire dans sa forme mais peu sur le fond… pour le moment.
On a parfois l’impression que le métavers n’a pas su convaincre le grand public. Y a t-il tout de même un avenir pour cette technologie ? Lequel ?
Oui, il faut simplement lui donner du sens, ne pas y voir qu’un moyen de l’exploiter commercialement, mais développer un service permettant d’apporter une plus-value pour les utilisateurs. La difficulté est surtout de trouver un acteur qui saura réunir suffisamment de fond pour développer un métavers plus intelligent que les autres dans ce sens (que ce soit un GAFA(M) ou autre, Tesla a bien révolutionné le marché automobile mondial, donc pourquoi pas un nouvel acteur dans l’industrie du digital ?).
Quels sont les projets et les initiatives majeurs en cours dans le domaine du métavers ? Pouvez-vous donner des exemples de plateformes ou de projets qui se démarquent dans ce domaine ?
earthmeta.ai et decentraland.org sont 2 beaux exemples actuels
Quels conseils donneriez-vous aux entreprises ou aux individus qui souhaitent s’impliquer dans le métavers ou tirer parti de ses possibilités ?
Pensez à la plus-value des utilisateurs avant les vôtres ! On fait un projet pour son public et non pour soi, bien que les intérêts principaux soient souvent orientés vers les finances, il faut être vigilant dans l’offre qu’on propose, les moyens d’y accéder et l’intuitivité au service, rien que là on comprend qu’on ne peut pas le faire à 2 dans un garage en 2024 c’est fini le modèle des start-ups américaines des années 90. Il faut penser grand et surtout multi-compétence, réunir les talents qui sauront faire murir et grandir le projet pour qu’il devienne une référence. Le public est de plus en plus exigeant car les services sont nombreux et qualitatifs en dehors du métavers. Il faut donc proposer quelque chose qui surplombe l’existant. Ça demande donc beaucoup de temps et beaucoup d’argent
En tant qu’expert de la gamification j’aimerais en effet avoir un sujet sur la question, où en sommes-nous sur le marché, les tendances, les serious games, avoir l’avis des entreprises, des demandeurs et des non demandeurs. Pas celui des acteurs comme nous qui sommes ultra convaincus car nous les créons et nous voyons les multiples bénéfices auprès de nos clients, mais qu’en pense les « non clients » ? Est-ce que la jeune génération est autant demandeuse qu’il y a 5 ans ? On entend beaucoup de chose sur la nouvelle génération qui arrive sur le marché du travail, le fait qu’ils pensent davantage à leur bien-être qu’a celui de leur travail, est-ce vrai ? Si oui comment devons-nous adapter le marché ? (le métavers ne serait-il pas un lieu de travail idéal pour eux ? 🙂 Je plaisante à peine).
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